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Retour en photos sur l'interminable errance des "migrants de la Chapelle" au début juin 2015, depuis le démantèlement du camp du pont Saint-Ange jusqu'au jardin d'Éole, en passant par la halle Pajol, le bois Dormoy et la caserne de Château Landon.
Mardi 2 juin 2015, le camp de migrants installé sur le pont Saint-Ange (c'est son véritable nom) boulevard de la Chapelle, dans le 18e arrondissement de Paris, est démantelé.
Depuis plusieurs mois, un camp informel de tentes s'était développé sur le pont Saint-Ange. Un pont qui enjambe les voies de chemin de fer du Nord qui arrivent à la Gare du Nord voisine, et qui supporte un boulevard à la circulation dense et le viaduc de la ligne 2 du métro. Un enfer de bruits. Jusqu'à quatre cents personnes à la fois, y compris des femmes et des enfants, se sont succédés dans ce que les médias ont surnomé le "camp de la Chapelle". Ces migrants, des réfugiés politiques pour beaucoup d'entre eux, sont essentiellement des Soudanais mais aussi des Erythréens, Somaliens ou Egyptiens notamment (voir ici). Certains ne sont que de passage, tentant de rejoindre Calais et gagner la Grande-Bretagne, d'autres souhaitent pouvoir s'intaller en France. Les conditions de vie y étaient particulièrement indignes. Aucun point d'eau et il y a fallu attendre plusieurs mois avant que les pouvoirs publics fassent installer des toilettes provisoires et procéder à un ramassage hebdomadaire des ordures. Seules les associations humanitaires leur venaient en aide.
Il est donc décidé de faire "évacuer" ce camp mais "avec humanité" nous rassurait-on. Le camp est donc démantelé et les migrants qui avaient été recensés quelques jours plus tôt sont emmenés vers des solutions d'hébergement très temporaires (voir ici). Mais cette opération laisse sur le carreau plusieurs dizaines de personnes non-recensées, arrivées très récemment ou tout simplement non présentes quand les forces de l'ordre ont bouclé le périmètre empêchant quiconque d'approcher le camp. Un certain nombre d'entre eux a laissé des affaires personnelles dans le camp qu'ils voient détruire sous leur yeux.
En effet, dans la foulée du démantèlement, le camp est immédiatement détruit par des engins de travaux. Des dizaines d'hommes en combinaison blanche s'affairent à faire disparaître toutes traces du camp. On installe des barrières de chantier tout autours du terre-plein central du pont que l'on surmonte d'un filet, le tout forme un barnum pathétique. Des vigiles avec chien gardent désormais l'endroit 24h/24h.
(Cliquer sur les images pour agrandir)
Vue sous le barnum du Pont Saint-Ange
Le pont Saint-Ange paré d'un "dispositif anti-réfugiés"
Vigiles et chien sous le viaduc
Pendant que les pouvoirs publics et les associations impliquées se félicitent du bon déroulé de l'opération et que des politiques de gauche et de droite se chamaillent sur les réseaux sociaux et dans les médias pour renvendiquer la paternité de l'initiative, les oubliés du camp de la Chapelle se retrouvent dans la journée du 2 juin autours du Square de Jessaint place de la Chapelle. Aucune solution en vue et la nuit approche. Certains vont rejoindre le campement d’Austerlitz, une autre camp en sursis, les autres dorment le peu qu'ils peuvent, où il peuvent.
Le lendemain, mercredi 3 juin, toujours aucune solution n'est en vue, mais finalement, les migrants trouvent un refuge pour une nuit à la Salle Saint-Bruno, une salle associative de la Goutte d'Or, rue Saint-Bruno à coté de l'église Saint-Bernard de la Chapelle.
Jeudi 4 juin, vers 19h, une tentative pour entrer dans l'église Saint-Bernard est menée. Saint-Bernard est un symbole fort depuis son occupation en 1996 par des sans-papiers délogés alors "avec humanité" nous affirmait-on, déjà. Pas question de rejouer le scénario de 1996, on empêche son investissement à tout prix. Les forces de l'ordre interviennent rapidement avec des chiens. Les migrants sont repoussés.
Refoulés, les migrants et quelques soutiens se replient dans le square Saint-Bernard-Saïd Bouziri et rue Affre sur le parvis de l'église Saint Bernard à présent gardée par de nombreux policiers. Les migrants, épuisés, se restaurent un peu gràce aux associations présentes et dorment tant bien que mal dans le square Saint-Bernard-Saïd Bouziri et sur les pavés devant l'église Saint-Bernard.
Les "migrants de la Chapelle" et leurs soutiens réunis sur le parvis de l'église Saint-Bernard, rue Affre, jeudi 4 juin 21h30
Parvis de l'église Saint-Bernard, rue Affre, jeudi 4 juin 23h45
Tract distribué par les migrants
Mais le pire n'est pas derrière eux, les migrants ne s'en doutent pas encore mais une journée pour le moins ubuesque les attend le lendemain. C'est cette journée (addedum : et les suivantes) que je vous propose de suivre à travers quelques photos.
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Le quartier de la Goutte d'Or s'éveille et découvre l'installation des migrants qui sont déjà réveillés. Une distribution de vivre commence. Tout cela se joue devant les forces de l'ordre qui entourent toujours l'église Saint-Bernard. La météo annonce une journée particulièrement chaude sur Paris.
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Des véhicules de police arrivent, échanges entre policiers. la distribution du petit-déjeuner se poursuit.
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Quelques voitures de polices prennent discrètement position dans les rues adjacentes, ici à l'angle des rues Affre et Cavé.
Autours de l'église Saint-Bernard, pas de mouvements, les rondes continuent.
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Rue Affre, devant l'église Saint-Bernard, la chaleur est pesante, le thermomètre affiche déjà plus de 30°.
Des repas sont distribués par des bénévoles et surtout de l'eau. Je discute avec une bénévole qui me confie, bien triste, qu'une riveraine est venue ce matin pour dire que cette situation est scandaleuse… car on empêche son enfant d'avoir accès à l'aire de jeu du square.
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Un grand nombre de policiers et de gendarmes mobiles bouclent à présent le quartier.
Les migrants sont encerclés et repoussés dans le Square Saint-Bernard-Saïd Bouziri.
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Les migrants encerclés dans le square.
Des renforts de gendarmerie arrivent par la rue Stephenson. Je discute avec deux jardiniers de la ville de Paris qui assistent au spectacle, dépités. Ils me disent qu'ils ont été dépêchés sur place afin "d'effacer toutes traces dans le square". Ils s'empressent de ma préciser qu'ils n'ont rien à voir avec ce qui se déroule sous nos yeux.
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On ne dit pas aux migrants quelle destination leur est réservée. Malgré les protestations des migrants, le déplacement commence.
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Les plus récalcitrants sont trainés de force au sol.
Un migrant est très violemment plaqué contre les grilles de l'église Saint-Bernard par cinq gendarmes. Rappelons que son seul crime est d'avoir fuit son pays en guerre et d'avoir voulu sauver sa peau.
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le cortège se met en route, descend la rue Saint-Bruno et tourne rue Stephenson. Les migrants commencent à scander "freedom, liberté!". Les forces de l'ordre poussent les migrants comme du bétail, ce n'est pas un cortège, c'est une transhumance.
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La rue Stephenson est investie par le groupe. Ironie, le pont Saint-Ange est en ligne de mire.
Des migrants restés à l'écart et des militants jugés trop véhéments sont repoussés et menacés par des gendarmes. La chaleur est étouffante, il fait 35°, à l'ombre.
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Les migrants sont poussés sur le pont de Jessaint en direction de la place de la Chapelle.
Les fourgons de police et de gendarmerie suivent, les soutiens et quelques journalistes sont maintenus en arrière, d'autres sont restés dans le groupe.
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Arrivés place de la Chapelle, les migrants se rebiffent et font un sitting sur la chaussée au débouché de la rue Marx Dormoy sur la place de la Chapelle.
Les policiers repoussent les migrants à coups de bouclier devant des passants médusés.
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Les migrants sont encerclés par les gendarmes et les policiers, plaqués contre la grille du square de Jessaint. Quelques élus EELV et PC des 10e et 18e arrondissements arrivent sur place.
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